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Vaccination contre la tuberculose en France

Le dossier du mois : la vaccination BCG - BEH 6 juillet 2010 / n° 27-28
Vaccination contre la tuberculose en France :

http://www.invs.sante.fr/beh/2010/27_28/beh_27_28.pdfCapture-d-ecran-2010-09-27-a-09.57.05.jpg

 

 

 


ceci  est  un extrait de la lettre de septembre destinée aux médecins Sentinelles

http://websenti.b3e.jussieu.fr/sentiweb/


Qui ?


Tout enfant possédant au moins UN des critères suivants :


né dans un pays de forte endémie tuberculeuse * ;
dont au moins l’un des parents est originaire de l’un de ces pays*;
devant séjourner au moins un mois d’affilée dans l’un de ces pays* ;
ayant des antécédents familiaux de tuberculose (collatéraux ou ascendants directs) ;
résidant en Île-de-France ou en Guyane ;
dans toute situation jugée par le médecin à risque


* Zones géographiques à forte incidence tuberculeuse :


le continent africain dans son ensemble ;
le continent asiatique dans son ensemble, y compris les pays du Proche et Moyen-Orient ;
les pays d’Amérique Centrale et du Sud ;
les pays d’Europe Centrale et de l’Est y compris les pays de l’ex-URSS ;
dans l’Union européenne : Bulgarie, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Pologne, Portugal, Roumanie.


Quand ?
dès la naissance, jusqu'à l'âge de 15 ans.


L’intradermoréaction (IDR) à la tuberculine préalable:
à partir de l’âge de 3 mois.


Les contre-indications :
temporaires = dermatoses étendues en évolution,
définitives = déficits immunitaires congénitaux ou acquis, notamment dus au VIH.

 

>>>>  La vaccination BCG : Histoire d'un changement de politique vaccinale

La France, où la tuberculose a fortement diminué lors des dernières décennies, fait actuellement partie des pays dits « à faible incidence » (9 cas pour 100 000 habitants en 2008). Toutefois de fortes disparités ont été identifiées avec l’existence de populations à risque telles que les populations précaires, les migrants originaires de pays à haute incidence, ou les personnes âgées (1). L'incidence de la tuberculose étant proche des seuils proposés par l’Union Internationale contre la Tuberculose et les Maladies Respiratoires, une réflexion progressive a permis l’arrêt de la vaccination systématique par le BCG en juillet 2007.
Plusieurs étapes ont été nécessaires et ont marqué l’évolution des politiques françaises de prévention vaccinale contre la tuberculose :
    2002 : bilan des connaissances scientifiques par une expertise collective de l’Inserm (2)
    2004 :étude de l’impact d’une interruption complète de la vaccination ou d’une vaccination ciblée auprès des enfants des populations à risque (3-5).
30 septembre 2005 et 9 mars 2007 : proposition du CSHPF (Conseil supérieur d'hygiène publique de France) et du CTV (comité Technique des Vaccinations) d’un ciblage de la vaccination par le BCG pour les enfants appartenant aux populations à risques.
    Janvier 2006 : arrêt de la commercialisation du vaccin par multipuncture Monovax®, utilisé à l’époque dans plus de 90 % des cas. Depuis le seul vaccin disponible en France est le BCG SSI® par voie intradermique. Or une enquête a montré que : « Moins de 30 % des médecins se disaient prêts à vacciner systématiquement les enfants après la disparition programmée de la multipuncture, et près d’un pédiatre sur cinq et d’un généraliste sur sept souhaitaient alors ne plus vacciner » (6). Depuis, seul 54 % des médecins généralistes et 26 % des pédiatres déclaraient poursuivre la vaccination systématique (7) et une diminution de plus de 50 % de la couverture vaccinale était constatée à partir des données de vente de vaccin (8).
    Novembre 2006 : organisation par la SFSP (Société Française de Santé Publique) d’une Audition Publique sur la levée de l’obligation vaccinale (9).
    Juillet 2007 : suspension de l’obligation vaccinale et parution de la circulaire d’application le 14 août 2007 avec la recommandation d’une vaccination chez les enfants appartenant aux groupes à risque. Pour ces enfants exposés à un risque élevé de tuberculose, la vaccination par le BCG est recommandée dès la naissance, et peut être réalisée jusqu’à l’âge de 15 ans.
Au regard du changement de politique vaccinale française, il est important de se remémorer les différentes expériences internationales. Elles montrent que l’arrêt ou la baisse de la vaccination systématique des enfants par le BCG peut entraîner une augmentation de l’incidence de la tuberculose chez l'enfant et nécessite une vigilance accrue (10,11). Suite à ces expériences internationales, l’InVS a été saisi par le Ministère de la Santé pour assurer la mise en place d’études sur le suivi de la couverture vaccinale, en particulier chez les populations à risque.

En attendant l'exploitation des certificats de santé des enfants (mis à jour en mars 2009),  3 enquêtes transversales ont à ce jour étudié l'impact de ce changement de politique vaccinale au niveau national.
Une première enquête française, menée en février-mars 2008 auprès de médecins généralistes et de pédiatres du réseau Infovac-France, a montré une diminution de la couverture vaccinale des enfants appartenant aux populations à risques (12). Elle était estimée à 58 % chez les enfants âgés de deux à sept mois (c'est-à-dire nés après la suspension de l’obligation vaccinale), alors qu’elle était à 77 % chez les enfants nés avant la suspension de l’obligation vaccinale, mais après la disparition du Monovax®. Point encourageant, la majorité des médecins et des familles acceptait de se conformer à la nouvelle politique vaccinale. Le taux de participation de 6,5 % était inhabituellement faible, engendrant des réserves quant à l’interprétation des résultats.
Une deuxième enquête, menée en 2009 auprès des enfants à risques suivis dans les services de protection maternelle et infantile (PMI), a montré, que bien que meilleure, la couverture vaccinale était insuffisante atteigant respectivement 90 % des enfants d'Ile-de-France, et 62 % de ceux hors Ile-de-France.
Une troisième enquête, menée de juin à septembre 2009, auprès des médecins généralistes Sentinelles, a également montré que 31 % des enfants de France métropolitaine était éligible à la vaccination, mais que parmis eux 44 % seulement était vacciné. Une analyse des déterminants du statut vaccinal des enfants éligibles a été réalisée. Parmi les enfants éligibles, la probabilité d'être vacciné était plus élevée chez les enfants de plus de 6 mois (OR = 3,4 (IC 95 % [1,4 - 8,6])), vivant en Ile-de-France (OR = 14,7 [4,4 - 49,5]), pour qui un voyage dans un pays de forte endémie tuberculeuse était prévu (OR = 3,5 [1,4 - 8,6]), et présentant un risque particulier selon l’omnipraticien (OR = 19,9 [6,2 - 63,9]). De même une meilleure connaissance des recommandations par l’omnipraticien (OR = 1,4 [1,1 - 1.9]) et la perception par ce dernier que la tuberculose était une maladie fréquente (OR = 2,2 [1,1 - 4,5]) augmentaient la probabilité que les enfants soient vacciné. Au contraire les enfants vus par des médecins possédant une capacité universitaire en maladies infectieuses étaient moins souvent vaccinés (OR = 0,14 [0,1 - 0,4]). Ces résultats alertent sur le risque de résurgence de tuberculose grave chez l'enfant et proposent des pistes de réflexions sur les actions à mettre en place pour améliorer la couverture vaccinale des enfants ciblés par la nouvelle politique vaccinale du BCG (nouvelles stratégies de formations des médecins, expliquant davantage les arguments des choix vaccinaux et les bases de la vaccinologie ; campagnes de vaccination dans les maternités; campagne de rattrapage pour les enfants les plus âgés, par exemple).

1.Antoine D, Che D. Epidemiology of tuberculosis in France : cases reported in 2008. BEH. 2010;27-28:289-293 <http://www.invs.sante.fr/beh/2010/27_28/beh_27_28.pdf> .
2. Groupe de travail du Conseil Supérieur d’Hygiène Publique de France. Prévention et prise en charge de la tuberculose en France. Synthèse et recommandations du groupe de travail du Conseil Supérieur d’Hygiène Publique de France (2002-2003). Rev Mal Respir. 2003;20:7S000-7S106.
3. Expertise collective Inserm. Tuberculose. Place de la vaccination dans la maîtrise de la maladie. Edition Inserm. 2004.
4. Bruhl DL. Estimation of the epidemiological impact of various BCG vaccination scenarios in France. Rev Epidemiol Sante Publique. 2005;53:501-8. <http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/16434924> 
5. Manissero D, et al. Assessing the impact of different BCG vaccination strategies on severe childhood TB in low-intermediate prevalence settings. Vaccine. 2008 Apr 24;26(18):2253-9. <http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/18400344> 
6. de La Rocque F, et al. [French paediatrician and general practitioner's survey about actual and future BCG use]. Arch Pediatr. 2005 Nov;12(11):1665-9.
7.Dommergues MA, et al. [French survey about intradermal BCG SSI adverse events in children under 6 years of age]. Arch Pediatr. 2007 Jan;14(1):102-8. <http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/17140780> 
8. Bruhl DL, et al. Recent changes in tuberculosis control and BCG vaccination policy in France. Euro Surveill. 2007 Sep;12(9):E070913 3. <http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/17900422> 
9. Société française de santé publique. Synthèse & recommandations de l’audition publique. Levée de l’obligation vaccinale par le BCG chez les enfants. Novembre-Décembre 2006. 2006. <http://www.splf.org/s/IMG/pdf/RapportBCGVF.pdf> 
10.Romanus V. Selective BCG vaccination in a country with low incidence of tuberculosis. Euro Surveill. 2006;11(3):14-7. <http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/16567880> 
11.Gordon M, et al. Knowledge and attitudes of parents and professionals to neonatal BCG vaccination in light of recent UK policy changes: a questionnaire study. BMC Infect Dis. 2007;7:82. <http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/17650337> 
12. Guthmann JP, et al. [BCG vaccine coverage in private medical practice: First data in children below two years old, seven months after the end of compulsory vaccination in France]. Arch Pediatr. 2009 May;16(5):489-95. <http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/19304464> 
13. Guthmann JP, et al. [BCG vaccination coverage in children born after the end of compulsory BCG vaccination and followed in maternal and child health clinics in France: A national survey 2009.]. Arch Pediatr.  <http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/20591630> 2010 Jun 28. <javascript:void(0);/*1284472304630*/> 

>>>> La vaccination BCG : Pourquoi continuer ?


Le vaccin BCG, même s'il n'est pas efficace à 100 %, même s'il ne protège pas la collectivité mais l'individu, même s'il ne protège pas contre toute les formes de tuberculose, et même s'il est responsable d'une cicatrice disgracieuse, est toujours fortement recommandé pour les enfants les plus exposés aux bacilles tuberculeux.

 

Pourquoi ?!


Efficacité du BCG :


La polémique sur l'efficacité du BCG date de sa découverte. Néanmoins les différents travaux disponibles permettent aujourd'hui de conclure que le BCG est efficace à 50 % sur les formes pulmonaires et 80 % sur les formes disséminées et les méningites (1-3). Lorsqu'il est infecté, un enfant est plus à risque que l'adulte de faire une tuberculose maladie, qui sera souvent plus grave que chez l'adulte. La tuberculose chez l'enfant est également la preuve d'une circulation du bacille dans la population adulte, la contamination d'enfant à enfant étant rare.


Effets secondaires du BCG SSI


Il est difficile de conclure sur ce sujet. Pour pouvoir obtenir des données fiables, un respect de la sémantique est nécessaire. Or pour le vaccin BCG, le terme "bécégites" est employé avec des significations différentes allant de la suppuration locale (normale et attendue) à l'infection disséminée secondaire à une injection de BCG (grave et exceptionnelle). Une étude récente française a montré que les effets secondaires étaient fréquents (18 %), mais rarement sévères (4). Pour rappel, les pays nordiques ont eu dans les années 70 de nombreux cas d'ostéites secondaires au BCG. Ces incidents étaient secondaires à une souche particulièrement virulente du BCG, qui n'est actuellement plus commercialisée.
Des enfants plus ou moins exposés :
Les recommandations ont ciblé les enfants les plus exposés au risque tuberculeux. En effet même si la France fait partie des pays à faible incidence avec 9 cas pour 100 000 habitants en 2008, il existe d'importantes disparités (4). La nouvelle politique vaccinale s'est basée sur ce constat pour choisir les critères d'éligibilité à la vaccination. Par exemple en 2008, l'incidence de la tuberculose était de :
17,9 cas pour 100 000 en Ile de France
22,6 cas pour 100 000 en Guyane
43,2 cas pour 100 000 parmi les personnes nées à l'étranger (et en fonction de l'ancienneté de l'arrivée en France, 267 pour 100 000 chez ceux arrivés depuis moins de 2 ans et 18 pour 100 000 chez ceux arrivés depuis 10 ans ou plus)


1. Schwoebel V, et al. Impact of BCG on tuberculous meningitis in France in 1990. Lancet. 1992 Sep 5;340(8819):611 <http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/1355184> .
2.Rodrigues LC, et al. Protective effect of BCG against tuberculous meningitis and miliary tuberculosis: a meta-analysis. Int J Epidemiol. 1993 Dec;22(6):1154-8. <http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/8144299> 
3. Colditz GA, et al. Efficacy of BCG vaccine in the prevention of tuberculosis. Meta-analysis of the published literature. JAMA. 1994 Mar 2;271(9):698-702. <http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/8309034> 
4. Dommergues MA, et al. French survey about intradermal BCG SSI adverse events in children under 6 years of age. Arch Pediatr. 2007 Jan;14(1):102-8. <http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/17140780> 5. <javascript:void(0);/*1284473146894*/> 
Dossier écrit par Louise Rossignol <mailto:rossignol@u707.jussieu.fr>

 


ceci  est  un extrait de la lettre de septembre destinée aux médecins Sentinelles

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