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Des neurologues proposent de modifier les critères du diagnostic de la maladie d'Alzheimer

Des neurologues proposent de modifier les critères du diagnostic de la maladie d'Alzheimer


Extrait :
UNE ÉQUIPE internationale de spécialistes de neurologie estime que le moment est venu de procéder à une redéfinition des critères permettant d'établir le diagnostic de la maladieimages-26.jpg d'Alzheimer, la plus fréquente des affections neurodégénératives.

Cette initiative, coordonnée par Bruno Dubois (hôpital Pitié-Salpêtrière, Paris, unité
Inserm « Neuro-anatomie fonctionnelle du comportement et de ses troubles »), résulte des nouvelles connaissances, acquises ces dix dernières années, concernant la physiopathologie de cette maladie.

Ces résultats ont été publiés, lundi 9 juillet, sur le site Internet de la revue The Lancet Neurology

  • Une redéfinition des critères d’Alzheimer
    Article de Jean-Yves Nau


    Au cours de ces dix dernières années, la progression des connaissances sur la maladie d’Alzheimer s’est accompagnée, fait hautement remarquable, d’une évolution du regard clinique et diagnostique porté sur cette affection neurodégénérative ; une affection dont on est encore loin d’avoir pris la mesure et l’ampleur des conséquences. Point n’est besoin de rappeler ici qu’il n’existe toujours pas de test de dépistage permettant d’affirmer de manière certaine, le diagnostic de la maladie d’Alzheimer.
    On sait aussi qu’en pratique ce diagnostic n’est porté qu’après élimination d’autres formes de démences et – au mieux – au terme d’un examen clinique très approfondi ; le tout sans preuve directe.
    En clair, affirmer le diagnostic de maladie d’Alzheimer impose, en toute rigueur, une analyse anatomopathologique post-mortem du tissu cérébral. Cette situation constitue bien évidemment un frein à une prise en charge précoce, médicamenteuse ou autre, des malades.

    Tout est peut-être ici à revoir.

    C’est en effet ce que suggèrent les travaux menés par une équipe internationale de neurologues coordonnée par Bruno Dubois, qui dirige l’unité «Neuro-anatomie fonctionnelle du comportement et de ses troubles» (Hôpital Pitié-Salpêtrière, Paris) de l’Institut national français de la santé et de la recherche médicale (Inserm) dans un article publié dans le dernier numéro du mensuel Lancet Neurology.1 Ces nouveaux critères plus spécifiques de la maladie se fondent à la fois sur des connaissances nouvelles du processus neurobiologique et sur la corrélation, établie grâce à l’imagerie, entre épisodes de perte de mémoire et altérations de zones spécifiques du cerveau. Ils présentent le grand avantage de proposer un diagnostic beaucoup plus précoce, et ce dès les tous premiers signes de la maladie, bien avant le stade de la démence.

    «L’initiative de ce groupe international a vu le jour en 2005. L’objectif des chercheurs réunis au sein de ce groupe de travail vise à redéfinir des critères diagnostiques, établis en 1984, rappelle-t-on auprès de l’Inserm. Depuis plus de vingt ans, les connaissances acquises de la maladie, tant sur le plan de la biologie de certaines zones du cerveau, que des signes cliniques tangibles, permettent, associées à l’apport d’outils tels que la TEP et l’IRM, de proposer des critères plus spécifiques à la maladie d’Alzheimer. Il existe aujourd’hui un faisceau de preuves laissant penser que l’apparition des premiers signes cliniques indique que le processus d’altération du cerveau est en marche, et ce via, notamment, le dépôt de plaques de la protéine b amyloïde.»

    En d’autres termes, lorsque l’on détecte chez le patient des troubles fonctionnels dans le domaine de la mémoire, le processus de dégénérescence du tissu cérébral est déjà significativement avancé.

    Aussi, la démarche de Bruno Dubois et ses collaborateurs a-t-elle visé à tenter de repérer au plus tôt les premiers éléments spécifiques (biologiques, cliniques, neuroanatomiques) de la maladie et ce avant même que les éléments caractéristiques d’un syndrome démentiel ne soient présents. Atteint, cet objectif – faut-il le mentionner ? – permettrait d’intervenir au stade précoce – ou «prodromal» – de la maladie. Ce stade est défini comme la phase de prédémence de la maladie d’Alzheimer, caractérisée par des symptômes pas suffisamment sévères pour faire partie des critères actuels de la maladie.

    Les auteurs de la publication de Lancet Neurology soulignent l’importance du syndrome amnésique de type hippocampique qu’ils ont défini et qui peut être identifié de façon précoce aux débuts de la maladie d’Alzheimer.

    Pour le groupe de chercheurs, il est hautement important de redéfinir un cadre de diagnostic de la maladie incluant le stade prodromal, et ce associé à la recherche de biomarqueurs spécifiques,détectés dans le liquide céphalorachidien, molécules dont la présence serait de nature à signer l’existence de la maladie à l’échelon cérébral.
    L’apport des techniques d’imagerie cérébrale (IRM et TEP) est intégré au dispositif diagnostique proposé par les chercheurs. «Les critères redéfinis visent à la spécificité absolue, explique Bruno Dubois. Les outils et critères de diagnostic à la disposition de la recherche sur la maladie d’Alzheimer devraient ainsi désormais permettre non plus seulement d’écarter une hypothèse de maladie à symptômes similaires pour finalement, par déduction, poser le diagnostic d’Alzheimer, mais bien d’affirmer (ou d’infirmer) spécifiquement la présence de cette maladie.

    Précisons ici les principaux critères permettant, selon ce travail,
    de porter le diagnostic de maladie d’Alzheimer
    r

    • Critères majeurs (obligatoires) :

    - Troubles de mémoire observés par le patient ou ses proches depuis plus de six mois.

    - Confirmation d’un trouble de la mémoire épisodique à long terme par des tests de mémoire qui montrent un syndrome amnésique de type hippocampique.

    • L’un ou plusieurs des critères suivants :

    - Atrophie de l’hippocampe à l’IRM.

    - Taux anormal de biomarqueurs dans le liquide cérébrospinal (protéine tau, Ab).

    - Métabolisme/perfusion réduits dans les régions temporale et pariétale du cerveau, par neuroimagerie fonctionnelle (PET/SPECT).



    «Ces propositions restent bien sûr à valider, par des études de cohortes, déjà existantes à l’échelle internationale, ou des cohortes prospectives à mettre en place. Les nouveaux critères proposés, croisés avec ces données recueillies à large échelle devraient permettre d’affiner leur sensibilité, leur spécificité et leur pertinence» précisent les auteurs de la publication. Pour Bruno Dubois, «il s’agit de données qui permettront de faire "éclater" la notion même de démence, un peu taboue à l’heure actuelle, et très mal appréhendée d’un point de vue opérationnel par les spécialistes». Pour les chercheurs, il paraît aujourd’hui évident que les traitements futurs qui permettront de retarder, voire de stopper la progression neurobiologique de la maladie, seront à prescrire, le plus tôt possible ; et ce dès les tous premiers signes détectables de l’existence de la maladie.

    Bibliographie
    1 Dubois B, Feldman H, Jacova C, et al. Research criteria for the diagnosis of Alzheimer’s disease : Revising the nincds-adrda criteria – a position paper. Lancet Neurology 2007 ; epub ahead of print.
    Contact chercheur : bruno.dubois@psl.aphp.fr

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