Les études ayant tenté d'évaluer l'impact de l'autosurveillance de la glycémie chez les patients diabétiques de type 2 et non traités par de l'insuline ont, jusqu'à présent, donné des résultats contradictoires : meilleur contrôle glycémique pour les unes, absence de bénéfice pour les autres.
Améliorer la "littératie en santé" semble être utile
La "littératie en santé", terme québécois sans véritable équivalent en France, est définie comme "la capacité de trouver, de comprendre, d'évaluer et de communiquer l'information de manière à promouvoir, à maintenir et à améliorer sa santé dans divers milieux au cours de sa vie".
Cette littéracie n'est que partiellement reliée au niveau d'éducation "car elle comprend d'autres compétences complexes, comme s'adapter à l'évolution constante de l'information sur les nouvelles maladies et les menaces à la santé, l'identification et la correction des renseignements contradictoires provenant de diverses sources et la communication avec les médecins, les amis et la famille à propos des diagnostics et des options de traitement".
Selon l'Agence de santé publique du Canada, "les régions sociosanitaires ayant des taux de littératie en santé plus hauts que la moyenne ont aussi un taux de diabète plus faible".
L'autosurveillance "augmentée", c'est-à-dire accompagnée d'une amélioration de cette littératie du patient par une formation à la juste interprétation des résultats, pourrait donc peut-être avoir un impact positif sur le contrôle glycémique.
Néanmoins les améliorations retrouvées dans 2 études suggérant une utilité de l'engagement du médecin et du patient pour interpréter les résultats et réagir en fonction de ces derniers, ne sont pas significatives statistiquement. D'où l'intérêt des auteurs à réaliser l'étude résumée ci-dessous pour confirmer ou infirmer ces résultats non significatifs, en sus de vérifier l'impact d'une autosurveillance glycémique "simple".
15 centres de soins primaires, 450 patients, 6 ans de diabète de type 2 en moyenne, le plus souvent sous metformine
Le Pr Katrina Donahue et ses neuf collaborateurs de l'université de Caroline du Nord à Chapel Hill ont donc recruté 450 personnes diabétiques de type 2 dans 15 centres de soins primaires.
Ces patients avaient en moyenne 61 ans (31 – 89) et avaient été diagnostiqués depuis 6 ans, en moyenne, diabétiques de type 2. Ils présentaient un BMI à 33 en moyenne (obésité modérée) et devaient avoir présenté une HbA1c entre 6,5 et 9,5 durant les 6 mois précédant l'étude.
Metformine, sulfamides hypoglycémiants, gliptines… et autosurveillance fréquente
80 % des 450 patients prenaient de la metformine, 35 % étaient traités par des sulfamides hypoglycémiants. D'autres médicaments indiqués en cas de diabète type 2 étaient pris nettement moins fréquemment : inhibiteurs de la dipeptidylpeptidase 4 (DPP4), également appelés gliptines (8,9 %), glitazones (4,7 %), analogues du glucagon-like peptide 1 (GLP 1), également appelés incrétinomimétiques (3,8 % des patients).
75 % des 450 patients autosurveillaient leur glycémie au moment de la préparation de l'étude, et 92 % l'avaient déjà fait, "en raison des préconisations liées à d'autres études et aux préconisations de sociétés savantes".
Une "littératie en santé" faible chez plus d'un patient sur deux
Le "Newest Vital Sign" (NVS), test élaboré par Pfizer (capacité à comprendre les enseignements santé d'un étiquetage nutritionnel d'une glace à la vanille), a été utilisé par les auteurs pour évaluer la littératie en santé des 450 patients.
Les résultats montrent que 38 % avaient une faible littératie en santé (score < 4 au NVS).
Trois groupes : pas d'autosurveillance, autosurveillance simple, autosurveillance avec messages de soutien automatisés délivrés par le glucomètre
Les auteurs ont répartis ces 450 patients en 3 groupes :
- un groupe sans autosurveillance quotidienne (n = 152) ;
- un groupe avec autosurveillance quotidienne (n = 150), vérifiée par le téléchargement des données du glucomètre ;
- un groupe avec autosurveillance quotidienne + délivrance de conseils adaptés par le glucomètre (n = 148).
Les conseils délivrés aux membres du troisième groupe par le glucomètre l'ont été afin de les "éduquer et de les motiver". Il s'agissait de conseils automatiquement corrélés à la glycémie du jour, au moment où elle avait été effectuée, etc. Par exemple :
- En cas de glycémie normale : "Vous avez un résultat conforme à vos objectifs. N'oubliez pas de vérifier votre glycémie demain matin". "Continuez à faire aussi bien". "Exceptionnel !". "Continuez à vérifier chaque matin avant le petit déjeuner !"
- En cas de glycémies légèrement élevées : "Prêtez attention à votre alimentation et votre activité physique, et peut-être que cela vous aidera à repérer les raisons pour lesquelles votre taux de sucre dans le sang est élevé". "Ce nombre est un peu au-dessus de votre objectif. N'oubliez pas de vérifier demain matin avant de manger".
- En cas de valeurs de glycémie très élevées : "Veuillez contacter votre médecin pour discuter des moyens d'abaisser votre taux de sucre dans le sang jusqu'à une valeur normale". "Veuillez prendre rendez-vous avec votre médecin. Vos glycémies ont été trop élevées ces derniers temps. Votre objectif avant le petit déjeuner est de 0,7 à 1,3 g/L".